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5G : Moitié cool, moitié inutile

Dernière mise à jour : 24 févr. 2020

Vous avez très probablement, voire inéluctablement étant donné que mon lectorat est au fait des technologies, entendu parler de la 5G. Que ce soit les élucubrations de ceux qui pensent que la 5G nous tuera tous ou que ce soit les fantaisies des départements de marketing de toutes les marques étant reliés de près ou de loin avec les télécommunications, il existe énormément d’informations au sujet de cette technologie.


La 5G, techniquement appelée 5G NR pour « 5G New Radio » , a fait son arrivée publique il y a quelques jours au Canada, à l’occasion du lancement de la série Galaxy S20. Rogers est le premier télécom sur la ligne de départ, avec une couverture 5G disponible dans 4 régions Canadiennes, soit Vancouver, Toronto, Ottawa/Gatineau et Montréal. Bref, les grands centres. Mais… ne regardez pas les cartes de couverture. Seul le réseau déployé à Vancouver et à Ottawa à l’heure d’écrire ces lignes procure une couverture relativement satisfaisante. Ailleurs au pays, le réseau est peu étendu et discontinu. À moins de résider en plein centre-ville, votre tout nouveau S20 sera en LTE-Advanced pour la majorité du temps.


Rogers déclare que leur réseau 5G actuel vous procurera des vitesses semblables à celles en LTE+. Pourtant, lorsque vous entendez parler de la 5G, n’entendez-vous pas à quel point la nouvelle technologie sera ultra rapide? Cette déclaration est clairement en contradiction avec ce que vous avez entendu. Pourquoi cela?


Hé bien, parce qu’il existe deux « types » de réseaux 5G NR. Techniquement, il en existe trois, le troisième étant la 5G NSA. Non, ce n’est pas une 5G spécifiquement pour être espionné par les États-Unis. La 5G NSA signifie Non-Standalone, ce qui veut dire non-indépendante. En effet, ce type de réseau 5G, en gros, s’appuie sur un réseau LTE pour les téléversements et les services de voix et de messagerie. À quoi ça sert? Pas grand-chose, à part permettre aux télécoms de se vanter d’avoir la 5G NR et de vendre toujours plus. Ceci a été utilisé pour plusieurs déploiements du réseau 5G en 2019 dans le monde. Le 3GPP, l’organisme qui se charge des standards de télécommunications « mobiles », a créé ce réseau pour permettre aux compagnies intéressées de commencer déjà à vendre la 5G NR à leurs consommateurs pendant que le standard complet soit finalisé, ce qui est arrivé à la fin 2019.


Bon, revenons aux deux véritables réseaux 5G. Il y a la 5G sub-6GHz et la 5G mmWave. L’une utilise des ondes millimétriques pour offrir des vitesses extrêmes et une capacité décuplée en zone fortement peuplée, l’autre offre une portée bien meilleure. Des avantages communs à chacun de ces réseaux incluent une latence fortement réduite comparativement à la LTE.


Ce que vous « avez entendu parlé », c’est la 5G mmWave, dont les fréquences oscillent entre 24GHz et 72GHz (100GHz en théorie). Ce réseau offre effectivement des vitesses potentielles de plusieurs Gigabits par seconde. Cette vitesse extrême vient avec un inconvénient majeur. En effet, plus la fréquence d’une onde est élevée, moins la portée de celle-ci est grande. Vous l’aurez probablement déjà remarqué si vous avez un routeur 5GHz chez vous et que vous éprouvez de la difficulté à avoir un bon signal dans un autre étage. Pour les réseaux mobiles, la portée effective de la 5G mmWave est quantifiable en mètres. En consultant les cartes des opérateurs américains ayant adopté ce réseau, il est facile de constater cela. Regardez cette carte de Chicago. Les tachez rouges sont des endroits couverts par le réseau 5G mmWave de Verizon Wireless. Remarquez à quel point le réseau est discontinu, et aussi le fait que la couverture se limite aux rues.

Faites vous-même l’expérience en allant ici: https://www.verizonwireless.com/5g/coverage-map/

La source de se problème est que la mmWave a une portée archi nulle. Il faut donc multiplier les antennes pour avoir une bonne couverture. Par contre, les antennes mmWave sont plus petites et relativement discrètes. Du moins, plus discrètes que celles actuellement utilisées pour la LTE!


D’autres opérateurs emploient aussi la 5G mmWave (dont AT&T, qu’ils ont nommé 5G+). Mais si vous regardez la carte de T-Mobile par exemple :

Ah, soudainement on passe de coins de rues à des régions complètes des USA. Comment est-ce possible? Qu’as donc fait T-Mobile? Sont-ils allés installer des millions d’antennes mmWave aux quatre coins des États-Unis?


Ceci m’amène au second réseau 5G NR, la sub-6GHz. Le nom suggère fortement que ce réseau emploie des fréquences en dessous de 6GHz, ce qui est effectivement le cas. T-Mobile a choisi d’investir beaucoup dans leur réseau 5G Sub-6GHz dès le départ en utilisant les bandes 600MHz. Cette fréquence est relativement basse, ce qui ne lui permet pas d’offrir des vitesses de plusieurs Gigabits par seconde. En contrepartie, cette fréquence se propage très bien, ce qui lui donne une portée exceptionnelle et lui permet de pénétrer dans les bâtiments. Pour comparaison, les fournisseurs Canadiens utilisent largement les bandes 700MHz car cette bande procure sensiblement les mêmes avantages.


Au Canada, les bandes 600MHz ont été mises aux enchères l’an passé. Rogers a effectué le plein et a mis la main sur des bandes 600MHz partout au pays. Notons que pour cette enchère, le CRTC a mis de côté environ 40% des bandes 600MHz pour les « petits fournisseurs » afin de leur donner une meilleure chance de compétitionner. Par exemple, Vidéotron a aussi mis la main sur des bandes 600MHz, mais les règles du CRTC leur a permis de se procurer des bandes pour tout le Québec sans surenchérir avec les autres fournisseurs.


Rogers a déclaré que leur réseau 5G initial utilise la fréquence 2.5GHz, ce qui explique donc que la couverture initiale n’est pas fameuse (sans être désastreuse non-plus) et que les vitesses sont supposées être les mêmes que celles offertes sur le réseau LTE-A. Rogers a aussi déclaré qu’ils vont utiliser généreusement leurs licences 600MHz pour étendre leur couverture 5G.


Ok d’accord, mais quel rapport avec le titre?


Seul le réseau sub-6GHz verra un déploiement significatif au Canada. Le mmWave est dans les faits complément inutile et terriblement inefficace. Vous ne risquerez pas de le rencontrer ailleurs que, par exemple, dans les stations de métro du centre-ville, des centres commerciaux, des lieux hautement touristiques ou bien des lieux où se déroulent des évènements majeurs tels un stade ou une scène de concert. Et de toute façon, vous n’en aurez pas besoin. Les forfaits actuels sont toujours excessivement chers, avec des allocations de données honteusement petites. Par exemple, le forfait 5G de base de Rogers, le Forfait Infini 10, vous accorde pour 65$/mois seulement 10Go de données à vitesse normale. Après cela, vous revenez à des vitesses similaires à celles de la fin des années 90. Sans rigoler. Nous parlons de maximum 512Kbps. Les autres fournisseurs majeurs offrent exactement la même chose, au même prix. Si l’on compare avec T-Mobile aux USA, une seule ligne à 80$ (convertis en dollars canadiens, ceci est leur forfait de base) vous donne une quantité littéralement illimitée de données. Oui. Même pas de vitesse réduite. Il y a une seule condition : Après avoir consommé 50Go de données par mois, si le réseau est surchargé, vos vitesses seront réduites. Voilà. Sinon c’est 100% illimité.


Récapitulons. Il vous sera impossible, du moins pour le moment, de profiter pleinement des avantages de la 5G mmWave. Donc oubliez les vitesses extrêmes, la Réalité Virtuelle en streaming et la 8K. Facile, non? Toutefois, l’autre moitié de la 5G vous offrira une couverture étendue, une latence très faible et un réseau généralement plus fiable (la technologie derrière la 5G permet aussi la prise en charge de plusieurs appareils simultanément plus efficacement). Les grands gagnants seront ceux en régions rurales, souvent mal desservies par les télécoms.


Petite note de fin sur les enjeux de santé. La 5G Sub-6GHz utilise des fréquences déjà utilisées ici et ailleurs. Donc il n’y a aucune inquiétude à avoir. Et pour la 5G mmWave, je vous laisse cette image infographique du IRSN, l’Institut de Radioprotection et de la Sécurité Nucléaire (il s’agit certes d’un institut Français, mais la physique et la science s’applique globalement haha):

Tout ce qui est non-ionisant est 100% sécuritaire pour notre santé. Source : IRSN.

Je vous laisse avec ce lien en complément, un dossier de L’Esprit Sorcier sur les ondes radios, incluant la 5G. L’Esprit Sorcier est, pour ceux qui ne le savent pas, la continuité de la célèbre émission de vulgarisation scientifique de France Télévisions « C’est Pas Sorcier », animée par Frédéric Courant (Fred!). Une mine d’or de qualité exceptionnelle d’informations sur à peu près tout ce qui concerne la science.

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